Scandale et lobbying autour de la maladie de Lyme

Le 19 novembre 2014, Willy Burgdorfer s’éteignait à l’hôpital d’Hamilton, dans le Montana, à 89 ans. Ce scientifique a donné son nom à une bactérie, qu’il a identifiée en 1982, Borrelia burgdorferi (Bb). Cet agent pathogène transmis par les tiques est responsable de la borréliose de Lyme, caractérisée aux Etats-Unis dans les années 1970 dans la ville de Lyme (Connecticut). Extrême fatigue, douleurs articulaires, paralysie faciale, voire perte de l’usage des membres dans les cas les plus graves figurent dans le tableau clinique.

L’incidence de l’infection croît partout dans le monde. En France, elle toucherait plus de 35 000 personnes supplémentaires chaque année, selon un réseau sentinelle de médecins généralistes. Mais le nombre réel de cas pourrait être bien plus élevé – l’association de malades France Lyme évalue à 650 000 les cas chroniques en France. Car la maladie est au centre d’une vive controverse. Pour les uns, elle reste très peu connue des médecins, mal prise en charge, et son incidence est sous-estimée ; pour les autres, elle est diagnostiquée à tort et à travers en dehors des recommandations officielles.

Mais les lignes commencent à bouger. En 2012, la Direction générale de la santé a ainsi saisi le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) pour qu’il produise un état des connaissances actualisé sur la borréliose de Lyme. Le rapport, assorti d’un avis, publié le 4 décembre, dresse l’état des lieux d’une situation complexe et émet des recommandations, notamment pour améliorer les performances des outils diagnostiques actuels et la prise en charge des personnes atteintes.

Actualité parlementaire

C’est un combat parlementaire perdu d’avance, puisque le texte déjà rejeté en commission ne devrait pas être adopté dans l’hémicycle jeudi prochain. En déposant cette proposition de loi UMP visant à mieux diagnostiquer, soigner et prévenir la maladie de Lyme, les députés UMP François Vannson (Vosges) et Marcel Bonnot (Doubs) semblent surtout avoir pour objectif de mobiliser urbi et orbi sur la maladie. Leur texte, vise à améliorer la connaissance du nombre, des besoins et des modalités de prise en charge des personnes atteintes par la maladie de Lyme, et prévoit la publication d'un rapport par le gouvernement dans un délai de deux ans. Il vise aussi à améliorer la formation des professionnels en en faisant un thème prioritaire de FMC (Formation Médicale Continue). Enfin, leur proposition de loi prévoit un plan quiquennal pour lutter contre une maladie en pleine expansion.

François Lallemand, très investi dans la lutte contre la maladie raconte : « Comme je suis à la frontière je me forme depuis plus de 20 ans en Allemagne, plus avancée qu’en France sur la maladie de Lyme » explique-t-il. Comme d’autres, le Dr Lallemand remet en cause la fiabilité du test de diagnostic Elisa, préconisé en France : « Depuis 2008, je fais pratiquer le test Western Blot utilisé en Allemagne ».

Il a également rencontré des problèmes pour traiter les patients atteints de la maladie. Attaqué par l’Ordre pour la prescription du Tic Tox, une huile essentielle , il s’en sort avec un blâme : « Nous sommes très peu à traiter la maladie de Lyme, et les médecins qui le font sont harcelés. Plusieurs procès doivent encore avoir lieu dans les prochains jours » confie-t-il. Même si la proposition de loi a été rejetée, le Dr Lallemand continue son combat « Il y a une véritable révolte chez les malades, on ne peut pas baisser les bras ».

Les partisans de cette proposition de loi s’inquiètent de la progression de la maladie, mais aussi de sa probable sous-déclaration dans l’hexagone (5000 cas recensés en 2012 contre 1 million en Allemagne !), du déni qui l’entoure et de l’inadapation du test de dépistage en usage en France.

La maladie de Lyme

Dans les cabinets et les laboratoires, une guerre particulière fait rage. Année après année, des tiques transmettent Borrelia burgdorferi à 200 000 personnes, il n’y a pas de vaccin. Les tests ont des défauts plus ou moins importants - et ainsi beaucoup d’infections passent inaperçues pendant des années.

Son et lumière : les 10 et 11 mai, les chutes du Niagara et la Tour CN brilleront de manière inaccoutumée, des actions sont aussi prévues á Berlin. Derrière tout cela ne se cache pas une action artistique – plutôt des patients à travers le monde qui essaient de faire réagir les médecins et les politiciens sur la maladie de Lyme. L’activisme peut paraître surprenant, mais il a un fond sérieux. La détection à temps des infections sans complication peut ainsi permettre de les traiter avec des antibiotiques. Sans traitement adéquat, cela conduit souvent à de la fatigue, des douleurs articulaires et musculaires, et des déficits cognitifs. Après ce stade, le système nerveux central et périphérique souffre encore plus (neuroborréliose).

La maladie commence après une morsure de tique par une infection locale, avec une éruption cutanée (érythème migrant), et des symptômes ressemblant à la grippe et parfois à des maladies gastro-intestinales.
En cas de suspicion, des laboratoires spécialisés analysent les échantillons de sang par l’Enzyme Linked Immunosorbent Assays (ELISA). La méthode présente plusieurs inconvénients : la sensibilité, la spécificité et la normalisation ne répondent pas aux attentes des médecins. Selon le Dr Armin Schwarzbach du Borreliose Centrum Augsburg, jusqu’à 70 pour cent de tous les tests ELISA restent négatifs malgré l’infection.
Les médecins en cabinet qui demandent les examens, souvent, ne le savent pas. » Selon la publication, la sensibilité du test est de 30 à 60 pour cent. Ce n’est qu’après des résultats ELISA positifs ou au moins limites que les échantillons doivent être vérifiées par un immunoblot, sinon les caisses de sécurité sociale ne prennent pas les frais en charge. « Les Immunoblots sont en effet plus sensibles que l’ELISA, mais ils n’excluent pas une infection. Ainsi le GKV(système de sécurité sociale allemand) rembourse seulement le « jeu de hasard » ELISA et laisse donc le sort du patient entre les mains du fabricant du test utilisé », critique notre collègue.

Le scandale

Viviane Schaller, 66 ans, docteur en pharmacie, et ancienne gérante d’un laboratoire d’analyses biologiques à Strasbourg, et Bernard Christophe, 65 ans, diplômé en pharmacie mais non inscrit à l’Ordre des pharmaciens, ont été condamnés à 9 mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Strasbourg, pour escroquerie à l’assurance-maladie, pour la première, et exercice illégal de la pharmacie, pour le second.
Ils se présentent comme "lanceurs d'alerte" face à une épidémie sous-estimée selon eux. Ils ont été lourdement condamnés par la justice.

Viviane Schaller a été reconnue coupable d'avoir appliqué pendant des années un protocole de dépistage de la maladie non homologué par les autorités sanitaires. Elle a ainsi annoncé à des milliers de patients, dans toute la France, qu'ils étaient bel et bien porteurs de cette affection pouvant provoquer des troubles invalidants et douloureux, notamment neurologiques, articulaires et musculaires, et ce alors que les tests "officiels" affirmaient le contraire.
« J’ai mis le doigt sur une anomalie, ça dérange », a commenté Viviane Schaller, tandis que Bernard Christophe a fustigé « l’industrie pharmaceutique qui continue de vendre des tonnes de médicaments pour soigner les centaines de symptômes induits par Lyme ».
Pour la Sécurité sociale, Viviane Schaller a gonflé les recettes de son laboratoire, et creusé le trou de la Sécu, en réalisant systématiquement deux tests de détection de la maladie de Lyme, le test Elisa et le test Western-Blot, au lieu de suivre le protocole réglementaire, qui ne prévoit un second test qu’en cas de résultat positif ou douteux du premier.
Oui mais voilà, pour Viviane Schaller, pharmacienne strasbourgeoise de 67 ans, le test Elisa des laboratoires bioMérieux (groupe Sanofi) n’est pas fiable, et seul le test Western Blot le serait. Se baser sur un résultat négatif d’Elisa pour ne pas soigner contre la borréliose de Lyme un patient serait risqué, selon elle, d’autant plus que cette maladie requiert un traitement rapide sous peine de complications. Mais rien à faire, le dialogue tourne court entre Viviane Schaller, la CPAM et l’Agence régionale de santé qui ferme le laboratoire en février 2012 pour « non respect des bonnes pratiques de santé ». Viviane Schaller ne peut s’opposer à cette décision et doit revendre son cabinet.

Bernard Christophe, 65 ans, a été condamné pour avoir fabriqué et commercialisé hors du cadre réglementaire un remède à base d'huiles essentielles contre la maladie de Lyme, baptisé "Tic Tox", pour soulager les personnes victimes d’une borréliose de Lyme.
Mais en janvier 2012, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ASNM) pense que le Tic Tox est présenté comme un médicament, qu’il n’y a pas d’autorisation de mise sur le marché et décide d’en interdire la vente. Bernard Christophe doit cesser son activité et se retrouve accusé d’exercice illégal de la pharmacie.
Selon Me Catherine Faivre, son conseil , « Bernard Christophe est convaincu d’avoir agi dans l’intérêt des malades. C’est un lanceur d’alerte qui a lourdement payé son engagement. L’ASNM se trompe quand elle assimile le Tic Tox à un médicament, il n’en a jamais été question, elle n’avait pas à en interdire sa consommation d’autant qu’en quinze années de commercialisation, aucune plainte n’a été déposée, aucune intoxication n’a été recensée. Aujourd’hui retraité, Bernard Christophe espère bien faire comprendre que la maladie de Lyme peut être une affection chronique et qu’il y a des alternatives aux antibiotiques. »

Car une controverse secoue la médecine et les institutions en charge de la santé publique : la maladie de Lyme serait-elle infiniment plus répandue qu’on ne le croit en France ?
De nombreux malades, notamment l’association« Lyme sans frontières »,soutiennent les praticiens, ainsi que quelques médecins, comme le Pr Christian Perronne, chef de service en infectiologie à l’hôpital universitaire Raymond Poincaré de Garches et président de la Commission spécialisée Maladies transmissibles (CSMT) du Haut Conseil de santé publique, qui dénonce une « sous-estimation dramatique de cette maladie ».
C’est un nouvel avatar de la controverse qui oppose des patients en colère aux autorités sanitaires accusées de s’accrocher à un « dogme de la rareté de la maladie ». Plusieurs médecins se sont succédés à la barre, sur demande de la défense, pour fustiger le manque de prise en compte de cette pathologie. « Il y a en France une sous-estimation dramatique de cette maladie », a commenté le Pr Christian Perrone, spécialiste des maladies infectieuses à l’hôpital universitaire Raymond Poincaré de Garches et membre du Haut conseil de la santé publique. Il a déploré que les tests de détection approuvés aient été calibrés « il y a 30 ans ».
Pour sa part, la présidente de l’association « Lyme sans frontière », Judith Albertat, a estimé que « des milliers de malades vivent un enfer, car ils sont bafoués, confrontés à un déni, une omertà ».

Sources

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Commentaires (1)

bodo
  • 1. bodo | 27/06/2017
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Date de dernière mise à jour : 05/07/2021