Les vrais problèmes occultés

Ces vrais sujets qui font peur à Nicolas Sarkozy  


On est en campagne. Les résultats sondagiers sont mitraillés sur une opinion publique indifférente. Un dernier donne Marine Le Pen présente au second tour chez les 18-24 ans. Dans un autre, Fillon devance d'une courte tête son patron Sarkozy dans le coeur des sympathisants de droite. A l'UMP, on « questionne » toujours la loyauté du premier ministre. Jean-Pierre Raffarin (dimanche) puis Claude Goasguen (lundi soir) ont attaqué frontalement Fillon. Pourtant, même à l'UMP, certains aimeraient qu'on parle enfin des vrais sujets.

Chiche !

1. La croissance ne sera pas au rendez-vous.
Le gouvernement s'apprête à réviser à la baisse sa propre estimation de croissance du PIB pour 2011. Il était temps. Cela fait 6 mois que la quasi-totalité des instituts publics ou privés sont plus pessimistes. Et la flambée des prix de l'énergie à cause des tensions dans les pays arabes n'a rien arrangé. Christine Lagarde sera toujours là pour nous expliquer que la reprise est là puisque la récession n'est plus. Mais avec un chômage en hausse, des rémunérations qui stagnent, une inflation qui repart... difficile de parler de reprise.

2. Les déficits publics vont se creuser.

Conséquence du point précédent, les rentrées fiscales seront moins bonnes que prévues. Et l'on se rappelle que la quasi-totalité des « économies » budgétaires trouvées pour ramener le déficit budgétaire à 6% du PIB en 2011 provenait en fait de la non-reconduction de dépenses ... non reconductibles. Il y a quelques jours, nos ministres se sont félicités de la « baisse » du déficit l'an passé. On l'attendait à 7,7%. Il ne fut « que » de 7%. Le journaliste Hervé Nathan, sur son blog Antibobards, révèle la supercherie comptable. Et la dette publique a atteint 81,7% fin 2010.

3. Les impôts devront augmenter. 

Le Parti socialiste a validé, et publié, les grandes lignes de son projet politique pour l'élection générale de 2012. Et la question fiscale apparaît en bonne place. Il propose une fusion de l'Impôt sur les sociétés et de la CSG, l'intégration de tous les revenus financiers dans l'assiette, le tout avec un barème progressif,  c'est-à-dire, s'inquiète Le Figaro, « en clair plus lourd pour les ménages aisés.» Pourtant, même à droite on cherche comment taxer un peu plus. Et parfois en s'éloignant des promesses du candidat Sarkozy. Prenez la réforme de l'ISF, en juin prochain. Elle serait l'occasion de réduire encore davantage la défiscalisation partielle de l'ISF en faveur des PME. « Bercy ne le cache pas : si le barème de l'ISF était allégé, il n'y aurait donc pas forcément lieu de maintenir un avantage fiscal aussi important pour les ménages. » révélait Lucie Robequain dans les Echos, la semaine dernière.

4. La rigueur ne sera pas juste.

Le 1er avril dernier, le gouvernement a augmenté les pensions (2,1%). N'y voyez aucun cadeau. Cette hausse était mécanique, car calculée sur une inflation revue à la hausse (1,8% contre 1,5%). Le seul coup de pouce concerne le minimum vieillesse, +4,7% (dont l'inflation), car, comme l'a rappelé Xavier Bertrand « Nous avons un engagement, de revaloriser le minium vieillesse de 25 % sur les cinq années.» Il a raison de s'y accrocher. Ce sera la seule promesse qu'il est finalement capable de tenir.

Depuis quelques mois, Nicolas Sarkozy se félicite du « pacte pour l'euro » de Mme Angela Merkel. Et que prévoit ce fameux pacte ? De « réexaminer les dispositifs de fixation des salaires et, le cas échéant, le degré de centralisation du processus de négociation, ainsi que les mécanismes d'indexation », c'est-à-dire notamment l'indexation du SMIC sur l'inflation. Lundi, le ministre de l'énergie a proposé de limiter la hausse des tarifs du gaz conventionné. Pourquoi faut-il des semaines de polémiques pour en accepter au moins le principe ?
  
5. La précarité est massive.
Le 4 avril, François Baroin et son secrétaire d'Etat à la Fonction publique George Tron se sont félicités d'avoir signé avec les organisations syndicales un protocole d'accord pour « sécuriser le parcours professionnel des contractuels de la fonction publique.» Contraint par des mois de polémiques, Nicolas sarkozy s'était résolu, lors de son intervention télévisée du 25 janvier dernier, à promettre de titulariser les précaires de la Fonction publique.

Et finalement, le résultat est bien maigre : il faudra justifier de 6 années d'emplois consécutifs pour obtenir la transformation de son CDD en CDI. Depuis 2007, le nombre d'agents contractuels a cru de 100.000, soit le nombre de suppressions de postes entre 2007 et 2012 promis par Nicolas Sarkozy dans la fonction publique...

Plus globalement, la précarité reste massive : les emplois qui se créent sont surtout partiels (en février, le nombre d'offres d'emplois de moins d'un mois a explosé de 17%); le chômage des plus de 50 ans ne cesse de progresser, stimulé par des ruptures conventionnelles qui remplacent les pré-retraites ; le nombre de chômeurs en fin de droits devrait frôler le million à la fin de l'année ; les profits des grands groupes du CAC40 sont repartis à la hausse en 2010 (frôlant le record de 2007 ), les bonus bancaires également, mais pas les comptes des PME. Le prix des denrées alimentaires explose. Et, selon un sondage, un Français interrogé sur trois déclare réduire ses dépenses alimentaires.

6. Les atteintes aux personnes augmentent depuis 2002.
En 2007, Nicolas Sarkozy s'est (notamment) fait élire sur un malentendu, sa prétendue efficacité à lutter contre la délinquance. Certes, les vols de voitures et, d'une façon générale, les atteintes aux biens n'ont cessé de reculé depuis 2002. Et comme ces délits se chiffrent en millions, ils emportent le résultat global. Mais les atteintes aux personnes, évidemment plus graves, sont elles en progression régulièr e : 381.000 en 2002, 433.000 en 2007 , 467.000 l'an dernier, soit +14% en 5 ans. A chaque publication statistique, le ministre titulaire trouve un angle original pour focaliser l'attention médiatique : les bandes, les cambriolages, les personnes âgées, les vols de smartphones dans le métro, la délinquance roumaine (si, si, rappelez-vous l'été dernier !)... Mais les faits sont têtus .

7. La politique étrangère de la France est incohérente.

Si l'on voulait parler d'actualité internationale, puisque celle-ci s'invite chaque jour dans nos journaux, on pourrait s'interroger sur le sens de ces dernières semaines. On fait la guerre en Libye, avec emphase et grandes déclarations. En Côte d'ivoire, on ne sait pas si Nicolas Sarkozy, qui communique beaucoup sur les réunions d'urgence qu'il tient sur le sujet à l'Elysée, s'est entretenu avec le président élu Alassane Ouattara des centaines de morts, civils compris, victimes des représailles du camp pro-Gbagbo d'après l'organisation Human Watch. Mais on s'émeut à peine des massacres massifs de manifestants en Syrie. On fait quelques courbettes nécessaires en Chine, mais on laisse la même Chine étouffer un peu plus sa contestation.

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Date de dernière mise à jour : 02/07/2021